Je vous propose de « prendre la peine », une expression qui revient souvent, trop souvent ?

J’inaugure la nouveauté de ces questions de langage et de vocabulaire avec une expression qui me taraude et me guide depuis longtemps : prendre la peine. Je ne sais pas si vous l’utilisez souvent, mais je me suis surprise à m’entendre la répéter plusieurs fois par jour. « Prendre la peine » de répondre, « prendre la peine » de s’en inquiéter, comme l’expression criante d’un égoïsme latent ou d’un manque de partage ou de politesse basique ?

Wonder Correctrice et ses mots...

Wonder Correctrice et ses mots…Image appartenant exclusivement à www.laplumeetlagomme.fr

« Prendre la peine » : une signification première, un sens profond

Comme je me plais à m’y référer quasiment tout le temps mon ami Larousse m’indique que prendre la peine signifie se donner le mal de ; à l’impératif, formule d’invitation polie : Donnez-vous la peine d’entrer. http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/peine/59016/locution.

Se donner le mal de… Faire l’effort de… Ça y est nous y sommes. Qui se donne encore la peine de se donner le mal ? Répondre à un appel sans y être forcé, aider ou conseiller un proche ou un ami, parfois il s’agit juste de donner une réponse, un avis, un mot, un merci. Pourtant dans mon travail quotidien de rédactrice web pour des entreprises comme dans ma vie privée, je me rends compte de ce triste constat : qui prend encore la peine de ?

Et si prendre la peine signifiait tout simplement être capable de prendre du temps, prendre garde, prendre soin ?

Telle est la question. Pourquoi ne prend-on pas la peine ? Sommes-nous devenus si individualistes que nous ne sommes même plus capables d’appliquer des principes simples de respect d’autrui ? Je n’oserais guère parler de courtoisie ou de politesse tant la valeur semble s’être émoussée au fil des décennies pour qu’elle en arrive à être considérée comme une hypocrisie d’avant-garde, une tradition inutile.

Pourtant cela vous semblera peut-être bête mais prendre la peine me semble être fondamental, tant pour travailler que pour tout simplement vivre en harmonie avec nos congénères. Lorsque je prends la peine de répondre à une demande, je prends du temps pour quelqu’un, je partage avec lui quelque chose, je lui consacre une attention de petite ou de grande envergure. Mais je consacre quelque chose à quelqu’un. Et je le respecte aussi.

Alors je continuerais à m’énerver de voir que certains ne prennent pas le peine de…là aux d’autres sont tout à fait capables de le faire. Et je continuerai à prendre la peine de faire comme cela car au fond, peu importe si les règles du jeu s’écrivent de plus en plus pour un joueur solitaire, la partie n’est gagnée que lorsque nous sommes solidaires, non ?

Mélanie Sorbets, www.laplumeetlagomme.fr